C'est libre que je suis meilleur

le dernier voyage / Conte pour citoyen / Ils ne trompent personne

"Il est des êtres dont c'est le destin de se croiser. Où qu'ils soient. Où qu'ils aillent. Un jour ils se rencontrent". Claudie Gallay

Le dernier voyage

Vers des cieux cléments
en ne rien emportant que
le beau sourire flamboyant
de l’amour quand il est pur
comme un vierge cristal,
jamais vu, jamais touché,
comme une fleur ouverte
à l’ombre du regard maladroit.
Partir sans regarder derrière
pour ne point contaminer
le futur qui reste à construire..
Rien, ni personne pour me retenir
sauf, peut être, le regard crédule
qui, en moi, préservait l’enfant.
Peut être, dans mes bagages,
un peu de ce qui me reste
comme indemne innocence
cette part de moi qui n’a jamais
abandonné le rêve d’une vie
que rien ne contaminera.
Je pars pour ne plus revenir
après tant de douleurs inutiles
tant de souffrances orchestrées
dans le giron des jalousies,
dans les mesquineries répétées
et les arrogances maladroites.
Je suis parti, le jour où j’ai compris
que derrière le sourire gratuit,
il y avait tant de calculs sournois
déguisés en mots courtois.
Je ne suis plus là, pour voir
le mensonge s’ériger en foi
sur les barbes qui dégoulinent
ou les voiles qui font semblant
d’être parfumés de pudeur.
Ma terre, sous les immondices
étouffe sous le poids de l’impotence
contractée à l’ombre des prières.
Dans le monde qui m’accueille,
il n’y a ni dieu, ni prophète
il y a l’esprit qui doute et se libère
pour inventer l’existence
aux couleurs des libertés.
Rester, c’est végéter ou périr
à la lisière des promesses
qu’on sait ne pas tenir.
Je déchire le dernier contrat
et redevient l’enfant frivole qui
danse au milieu des coquelicots.
Il est mort le brave citoyen
pour renaître vierge apatride
au pays de l’insouciance.
Parler aux oiseaux et au vent
s’incliner devant les vagues
et se recueillir sur les berges
des rivières qui voyagent,
telle sera ma seule religion.

Le léopard

Ils ne trompent personne !

La traditionC’est un souk couvert où ils viennent vendre leurs idées, s’associer à d’autres pour se partager les bénéfices. Nous sommes loin de l’honneur de servir, loin de la fierté d’être au service d’une commune, d’une idéologie franchement déclarée, d’un programme mûrement réfléchi. Nous sommes en présence de vautours qui attendent la fin de l’agonie, des hyènes qui se jettent sur la proie sans défense. Ils ont bien compris que pour tromper les gens, il faut tatouer Allah sur le front. Cela inspire la confiance quand on prend Dieu pour témoin. La recette est facile et efficace. La présence affichée le vendredi est obligatoire car c’est ce jour qu’on se rencontre, qu’on échange nos plans et qu’on prend rendez-vous pour affiner et donner l’allure de quelqu’un qui travaille. Si vous êtes un mâle, la barbe, si elle n’est pas obligatoire, est souhaitable et si vous êtes une femme, de celles qui attendent dans le couloir, les dossiers encombrant pour faire illusion, il faut porter le voile et choisir un tailleur qui élimine toute rondeur. Quand on est invité à parler, il faut avoir, en permanence des sourates et des hadiths, car cela fait croyant quand on les glisse entre le verbe et le complément. Une des qualités indispensables est de toujours croire qu’on a toujours raison à cause et grâce à notre proximité de Dieu. Il faut distiller la modestie pour paraître mais cultiver l’arrogance pour éloigner la critique. Il faut apprendre à savoir définir qui de nous est le croyant et le répéter sans cesse jusqu’à faire croire que c’est par la crainte de Dieu qu’on devient ministre. Qu’importe si la vérité est autre, le mensonge est volatil et ne dure que le temps que l’on prend pour convaincre. Après le doute vient frelater la chose comme une eau trouble où se plaisent les tortues. Tromper Dieu pour tromper les autres est la pire des félonies car elle métamorphose l’être et le condamne à souffrir quand il se croira à l’abri du juge et des regards !

Merci pour votre visite !

Qu’est ce qui a changé ?

Il n'y a pas de pauvreté au Maroc

Bassima El Hakkaoui

Elle n’a encore rien fait et elle ne fera rien car tout ce qu’elle pense n’est pas à elle. Elle s’inspire de ces murmures masculins qui ont accepté de la voir siéger parmi eux, dans cette assemblée d’hommes. Elle ne parle que quand le silence s’installe et que les idées s’épuisent. On lui a redonné les mêmes fonctions car pour eux elle a assuré. Eux ce sont ceux qui pensent que la polygamie est une chance, le mariage des mineures, un choix judicieux et qu’une femme ne doit hériter que ce qu’on veut bien lui donner. Si elle toujours là, c’est bien qu’elle est incontournable, irremplaçable et efficace.
J’avais imaginé, il y a deux ans ce portrait d’une femme ministre, une femme musulmane et ministre…

Conte pour citoyen

Il y a dans ce pays des hommes et des femmes pour qui, être ministre est le summum de la réussite sociale, le top de cette échelle qui arrive aux portes du palais royal. Beaucoup s’investissent, corps et âme, pour escalader les échelons. Les uns parachutés, les autres poussés par derrière et depuis que nous avons choisi la loterie électorale, des personnages tombent, comme par miracle, sur le fauteuil ergonomique d’un ministère. Le printemps (pour d’autres, c’est un hivers) arabe nous a apporté un courant importé des pays du golf et qui s’impose par sa proximité de la Mecque. Point cardinal des prières musulmanes. La mode s’est installée si vite que le voile et la barbe sont devenus les meilleurs ingrédients pour faire « Bon citoyen ». Plus économique, le voile a permit la faillite des salons de coiffure mais le prix du tapis de prière a augmenté plus vite que le CAC 40 ! Nous avons même des ministres au féminin, avec voile et chapelet au point de se croire aux portes du paradis. Certaines se cachent derrière le discours insolent car une femme doit crier deux fois plus pour être entendue et si nous nous sommes habitués au mensonge des hommes, elle mentent mieux et plus, au point de croire qu’à force de se convaincre, le mensonge a remplacé la vérité dans leur cervelle qui étouffe sous le voile devenu obligatoire.
Une femme ministre dans son bureau, si grand qu’elle est incapable de voir l’horizon, respire l’extase, elle commande et domine des centaines de, pourtant bien valeureux, hommes fonctionnaires. Les femmes, elles, ont subi des mues et pour plaire et paraître, elles se doivent de se mettre au voile et le chapelet a remplacé la lime et le vernis à ongle. La djellaba, cache-misère d’antan, est revenu pour obstruer le regard devant la glace et l’obésité menace la plupart.
La ministre passe dans le couloir comme un juge dans le couloir de la mort. On lui ouvre la porte et on dépose son attaché case sur le large bureau chargé de livres, de dossiers et d’appareils. Elle attend que le secrétaire délégué du parti sorte et ferme la porte capitonnée et elle s’affaisse comme si, de sa voiture à son fauteuil, elle se remplissait d’air les poumons pour paraître hautaine. Un responsable, pour elle, doit respirer les couches supérieures de l’air. L’air vicié de la base n’est pas pour eux ! Elle se déchausse et redevient presque humaine à l’abri des regards. Elle aurait aimé faire une pirouette tellement elle se sent fière. Fière d’être arrivée, fière d’être parvenu à surclasser les hommes qu’au fond d’elle, elle méprise. Elle regarde les murs et s’arrête tour à tour, au grand cadre d’or qui supporte quelques versets de sourate « la femme », venu remplacer la scène mythique de la tour Hassan, le « majmar » (brasero) électrique pour l’encens et le bois de Santal venu de Djeddah en Arabie Saoudite. L’odeur du musc parvient jusqu’au fond du couloir. Depuis qu’elle a investit les lieux, son ministère ressemble plus à une mosquée qu’à un édifice administratif. Les tapis de prière commandés au salon marocain de l’artisanat, les CD où la voix rêche psalmodie le Coran de l’ouverture à la fermeture. Même le dos des écrans d’ordinateurs sont estampillés d’autocollants d’Allah ou Akbar.
Son téléphone sonna, elle posa le combiné sur son oreille sous le voile de soie beige. elle échangea les salamalecs d’usages entre croyants avec un pied, déjà, dans le paradis. Elle l’écouta en n’émettant que des « hmm » en guise de réponses aux instructions du grand frère du parti. Tout en écoutant, elle prenait des notes et termina l’appel avec des courbettes verbales. Elle regarda la feuille et reprit le combiné pour appeler le secrétaire délégué du parti pour lui demander de chercher combien vaut le dollar de l’oncle Sam.
Elle nota la réponse et fit un petit calcul en feuilletant le rapport de Ban Ki Moon. Elle murmura « 28,95 dirhams par jour, c’est Al khir ou Lbaraka pour vivre ! »
Elle se leva, remit de l’ordre dans sa tenue, regarda la moquette et se dit qu’elle doit la changer contre un tapis de laine, fait mains à Kelaat M’Gouna ou à Azilal. Elle sonna le secrétaire délégué du parti et lui cria d’un ton sec « Préparez ma voiture, je vais au parlement ». L’exercice souffle retenu et menton vers le ciel commença quand elle sortit dans le couloir suivi par le secrétaire délégué du parti, marchant derrière comme un caniche complice de sa maîtresse !

Ex-ministre de la solidarité du parti islamiste PJD

Khadija Mouakiti

Je ne cesse d’admirer votre déscription détaillée dans les moindres nuances qui traduit toute l’histoire de la métamorphose de la pensée politique au Maroc et de la pensée tout court. L’opportunisme politique, le cynisme doctrinal et la totale instrumentalisation de la religion. Une description et une mise en scène parfaites, profondes et bien cernées

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